MétaMorbac



MétaMorbac

Mon Dieu !!! Cette fois c’est la fin pour moi. Je sens déjà cette odeur de réglisse(1) envahir mes narines. Je suis un morpion et je vais mourir d’ici quelques minutes, assassinée par une lotion qui sent le bonbon. Vous me direz « mais un morpion ne peut pas parler ». Effectivement, c’est le cas pour un morpion normal, sauf que je ne suis pas un morpion comme les autres. En réalité je suis une femme, je m’appelle Isabelle, j’ai 39 ans et je suis en fait une métamorphe. Hé oui pas de chance ! J’aurais pu me transformer en loup, en coyote, même en lapin ça aurait pu passer, mais nooooonnn, il a fallu que je sois une méta-morpion. Dans le genre pas de chance, je me pose là.

Laissez-moi vous raconter comment tout à commencer.

***



Tout à commencer à mes 18 ans. J’étais tranquillement endormie contre mon petit copain, nous venions de faire l’amour (encore heureux ce n’était pas ma première fois, sinon je vous laisse imaginer le traumatisme que j’aurais eu à vie), je dormais d’un sommeil profond et serein, mais d’un seul coup je me suis mise à avoir si froid que ça m’a réveillée. J’avais eu beau me coller à mon ami, impossible de me réchauffer. Je me suis alors mise en position fœtus tout contre son torse, quand tout à coup j’ai ressenti des décharges dans tout mon corps. Je me suis sentie rétrécir, rétrécir, rétrécir et j’ai vu mes membres se changer en pattes. Et puis, pouf ! D’un coup je me suis retrouvée dans une sorte de forêt. J’étais perdue, j’avais grand peur, j’étais même terrorisée.

Mais que s’était-il passé ?

Où me trouvais-je donc ?

Est-ce que je faisais un cauchemar ?

Je n’avais aucune réponse à mes interrogations. Je me suis alors pelotonnée dans cette forêt, le long d’un tronc et j’ai pleuré. Et pas des petits pleurs, noooonnn, plutôt d’énormes sanglots. Après avoir évacué toute cette peine et cette peur, je me suis finalement endormie épuisée. Je me suis réveillée quelques heures plus tard en ayant grand chaud et ce qui c’était produit plus tôt recommença, mais en sens inverse. Je me suis sentir grandir, grandir, grandir et j’ai vu mes pattes redevenir des membres. Une fois revenue à ma taille normale, je me suis propulsée hors du lit, me suis habillée à toute vitesse et j’ai couru chez moi.

C’était le petit matin et en passant le pas de la porte, je trouvais mes parents installés à la table de la cuisine à prendre leur petit-déjeuner.

—Isabelle ma chérie, qu’est-ce qu’il t’arrive ? Tu es toute blanche.

—Maman, papa, je dois vous raconter un truc, mais je vous en prie ne m’envoyez pas chez les fous. Je vous jure que tout ce que je vais vous raconter est vrai.

—Ok ma chérie. Vas-y nous t’écoutons.

Alors je leur ai raconté tout ce que j’avais vécu cette nuit en baissant la tête pour ne pas avoir à affronter leurs regards qui devaient être celui de parents pensant que leur unique fille venait de perdre la tête. À la fin de mon récit, j’osais alors lever la tête et les regarder. Mais au lieu de voir de la peur dans leurs yeux, j’y vis de la peine et de la résignation.

Ma mère se leva alors, et vint me prendre dans ses bras.

—Oh Isabelle ! Je suis désolée. Nous aurions dû te parler de ça bien avant, mais nous avions espéré que ça ne t’arriverait pas.

—De quoi auriez-vous dû me parler avant ? Qu’est-ce que vous espériez qu’il ne m’arriverait pas ? Je ne comprends rien. Vous saviez que ce qui s’est produit cette nuit arriverait ?

—Oui ma chérie, nous le savions. Et je le sais d’autant plus que ça m’arrive aussi à moi régulièrement depuis l’âge de 18 ans. Isabelle… tu es une… métamorphe.

—Une métamorphe ? Tu veux dire comme les personnes qui se transforment en loups ?

—Oui.

—Mais je ne suis pas devenue un loup. Enfin ce n’est pas l’impression que j’ai eue.

—Non tu ne t’es pas transformée en loup.

—En quoi alors ?

Ma mère jeta alors un regard lourd à mon père, puis après quelques minutes de silence, reprit la parole et m’annonça :

—En morpion.

—EN MORPION ! Tu veux dire, morpion comme morbac ? Comme les bêtes qui se trouve dans les poi… OH… MON... DIEU ! Je ne me trouvais pas dans une forêt alors ? Je me trouvais dans des poils pubiens ? Je me trouvais dans les poils de bite de mon petit copain ? Hurlais-je.

—Oui ma chérie.

—Mais quelle horreur ! Dis-moi que c’est une blague maman. Dis-moi que c’est une caméra cachée. Hein ! C’est ça ? C’est une caméra cachée ? Marcel Beliveau sort de ta cachette. Vous m’avez bien eue, dis-je en rigolant en pensant que mes parents me faisaient effectivement une bonne blague.

—Non Isabelle, ce n’est pas une blague. Tout ceci est vrai. Tu es, tout comme je le suis, une méta-morpion.

J’étais perdue, je ne comprenais rien à ce qui m’arrivait. J’étais un méta-morpion. Mon monde venait de s’écrouler.

—Ce n’est pas grave ma chérie. Tu t’y habitueras, je te le promets.

—Je m’y habituerais ! Non, désolée, je crois que jamais je ne pourrais m’y habituer. Et comment ça se passe ? Est-ce qu’il y a des moments précis où je me transformerais ? Est-ce que je peux l’éviter ?

—En fait non tu ne pourras pas le contrôler. En général on se transforme dans les heures qui suivent un… rapport sexuel.

—Tu veux dire que je ne pourrais plus jamais coucher avec un homme sans me transformer après ? Mais c’est un cauchemar. J’ai plus qu’à me faire nonne si je comprends bien.

—Non ma chérie, seulement tu devras expliquer ta « condition spéciale » à l’homme avec qui tu coucheras. Ton père est au courant depuis le début, ça n’a pas été évident de lui expliquer, mais il a fini par comprendre et l’accepter. Il m’a vue me transformer plusieurs fois.

—Comment as-tu fait pour ne pas partir en courant papa ?

—J’aimais ta mère, me répondit mon père qui prenait la parole pour la première fois depuis que j’avais raconté mon histoire. C’est vrai qu’au début je n’ai pas voulu le croire, mais quand ta mère s’est transformée la première fois je ne pouvais plus le nier. J’ai eu peur c’est vrai. Je me suis aussi posé beaucoup de questions. J’ai aussi pensé la quitter. Mais je l’aimais et j’ai fini par accepter cette « condition spéciale ».

—Et cette transformation dure combien de temps ? Seulement quelques heures ?

—Non pas toujours ma chérie. Parfois cela peut durer un ou deux jours. Le maximum qu’a duré une de mes transformations a été de deux jours, et ta grand-mère, qui est aussi une méta-morpion, pareil.

—Alors tes déplacements professionnels en fait n’en étaient pas.

—Non effectivement. C’est aussi pour cette raison que tu devras prévenir ton partenaire, car tu pourrais disparaitre pendant un jour ou deux. Un dernier point.

—Allons bon, qu’est-ce qu’il peut y a avoir de plus ?

—Cette nuit tu ne l’as pas ressenti, car tu étais trop choqué pour en avoir conscience, mais quand tu seras sous ta forme morpion tu auras envie et tu devras…

—Quoi ?

—Tu auras en envie et tu auras besoin de… sucer ton partenaire.

—QUOI !!!

—Désolée ma chérie, mais un morpion se nourrit de sang. Tu ne pourras rien y faire et tu ne pourras pas l’éviter.

Je vivais vraiment un cauchemar, cette fois-ci j’en étais sure.

—Tu devrais aller te reposer ma chérie. Si tu as d’autres questions, n’hésite pas à venir me les poser.

Je suis montée dans ma chambre complètement chamboulée, me suis couchée sur mon lit, ai pleuré toutes les larmes de mon corps et me suis endormie.

***



Je vous passe le détail de toutes mes transformations qui n’ont pas été si nombreuses et pour cause, à cause de ma condition, je n’ai pratiquement pas eu de rapports sexuels. Mais les rares fois où ça m’est arrivé, j’ai eu la chance de ne m’être transformée que trois ou quatre heures et mon compagnon du moment ne s’est rendu compte de rien.

J’ai dû, comme me l’avait expliqué ma mère, me nourrir de sang et sucer mon partenaire. Et à mon grand malheur, j’ai adoré ça.

Puis j’ai rencontré, Patrice, celui qui est aujourd’hui mon mari. Malgré l’insistance de ma mère, je ne lui ai jamais dit que j’étais une méta-morpion. Les rares fois où j’ai disparu pendant un jour ou deux mes parents m’ont couverte et jusqu’à aujourd’hui tout c’était toujours très bien passé…. Jusqu’à aujourd’hui.

Ce qui nous ramène au présent.

***



Donc je suis là dans les poils pubiens de mon mari qui vient de se rendre compte qu’il avait un morpion. Quand je suis sous ma forme morpion, je comprends et j’entends tout. Je vous laisse donc imaginer ce que j’ai pu ressentir quand j’ai compris que Patrice allait me tuer à coup de lotion anti-morpions. Cela fait une journée que je suis sous ma forme morbac et je crois que j’ai un peu abusé en suçant trop mon mari. Du coup, ça le démange et il a compris qu’il avait un morpion. Avant que n’arrive la lotion, j’ai déjà failli mourir plusieurs fois écrasée sous ses ongles quand il se grattait.

Voilà, j’en suis donc là à attendre qu’il applique la lotion qui va me tuer. Je vois sa main enduite du produit à la réglisse se rapprocher de moi, je retiens ma respiration pour ne pas inhaler les effluves qui vont causer ma perte.



DING DONG



La main recule, il se la lave et remonte son pantalon. Mon dieu je viens d’être miraculeusement sauvée par un visiteur matinal.

***



1 semaine plus tard



Désolée de vous avoir laissé tomber en plein suspens, mais sur le coup il m’a été impossible de vous narrer ce qui m’arrivait. Je vais donc vous faire un petit récapitulatif. 
Déjà comme vous pouvez le constater je suis toujours en vie, et cette fois je suis sous ma forme humaine. Mon sauveur, enfin mes sauveurs étaient en fait mes parents. N’ayant pas eu de nouvelles de ma part depuis plus d’une journée, ils étaient passés voir mon mari pour renforcer mon alibi. 
Oui, quand je commençais à me transformer j’avais juste une touche à appuyer sur mon téléphone portable (téléphone toujours placé sous mon oreiller) pour les avertir que je passais en mode morpion. De là ils s’occupaient de me fournir un alibi, qu’il venait renforcer suivant le temps que durait ma transformation. 
Donc ce jour-là, jour de mon sauvetage, ils étaient passés justement pour rajouter un jour de plus à mon séjour chez ma vieille tante malade (oui c’était l’excuse cette fois-ci). Quand mon mari les avait avertis mal à l’aise qu’il avait attrapé des morpions et que justement, il allait appliquer de la lotion au moment où ils ont sonné à la porte, mais parents lui ont alors expliqué ma condition et mon histoire.

Comme je le pensais, Patrice n’y a pas cru et a traité mes parents de vieux fou. Pourtant, le soir venu, il a veillé. Il s’est couché, mais a attendu. 
Ah oui !  je ne sais plus si je vous l’ai dit, mais les transformations se passent toujours la nuit. Ma mère me l’avait expliqué quelques jours après l’annonce de ma « condition », voilà comment, j’ai pu avoir des relations sexuelles sans avoir à subir une transformation… je ne couchais avec des hommes que la journée, enfin quand c’était possible.

Bref, pour en revenir à nos moutons. Patrice a veillé toute la nuit, puis vers 5h du matin, je me suis transformée sous ses yeux. Il a crié, hurlé de terreur, puis une fois le choc passé, nous avons longuement parlé. Puis il a compris et a accepté ma « condition ». La seule chose qu’il m’a dit c’est qu’il préférait que je le suce sous ma forme humaine et non sous ma forme morpion.

Depuis une semaine, il m’a trouvé un nouveau surnom « méta-morbac », n’est-ce pas mignon ? Non je rigole, j’ai horreur de ce surnom, j’espère que ça va vite lui passer, mais vu comment ça le fait rire, ce n’est pas près d’arriver.




   (1)Non je n’ai jamais eu de morpions et mon mari non plus, l’idée de l’odeur de réglisse m’est venue en repensant à un épisode de Desperate Housewives.


Toutes ressemblances avec une personne ayant existé est une pure coïncidence (enfin presque).

 Fin


Cette nouvelle a été écrite dans le cadre d'un gros délire pour les copinettes de Facebook.


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